Jocelyn REGINA

Un conteur, plusieurs paroles
ou
L’art de manipuler le verbe 

 Quel est le point commun entre un conteur, un poète, un slameur, un parolier, un diseur ? Jocelyn Régina en est l’illustration vivante de toutes ces formes du dire et c’est sur scène que le mieux, il nous livre cette illustration.

 Il nous offre une récréation avec rebondissements à la hauteur de ses exigences avec des textes ciselés et décalés, servis par un artiste en « chair et en notes », car sa parole est musicalité.

 Très imprégné des traditions, dans sa pièce, il met en scène ses personnages favoris, à savoir : « Nous ». Il incarne des personnages dans une succession de paroles décapantes, pour le grand bonheur du public, qui croit voir la réalité se jouer devant lui.

 Ces personnages sont des figures traditionnelles, imaginaires, des créations fictives et anonymes. Il place en son centre, l’être humain lui- même, il en révèle la duplicité, la capacité à la simulation et à la dissimulation.

 Il passe en revue tout ce qui touche de près ou de loin, la société moderne (les discriminations raciales, la pauvreté, l’éducation, la violence…) en tenant sa salle en haleine en le faisant se plier de rire ou s’interroger. 

 Une pièce a besoin pour exister, en plus du papier et de la plume, d’une participation corporelle, qu’il implique parfaitement.

 En fait, les histoires et les composantes sont imaginaires, mais les sentiments sont sincères. On note l’importance de la vérité, au détriment des apparences. C’est un monde de voyage, qu’il nous offre là. L’univers scénique est concret mais en même temps irréel. Un univers abstrait, mais dont l’importance des émotions en fait une force : sa parole fonctionne comme une mimesis, à savoir une imitation de la réalité et de l’action humaine.

 Ce qui frappe, de prime abord, avec Jocelyn, c’est la posture d’aisance, qu’il affecte de montrer à son public. Il arrive tranquillement sur scène, comme à la maison, il devient notre hôte.

 Les relations qu’il entretient avec ses interlocuteurs sont intimistes.

 Cette relation de proximité, favorise l’échange.

 Sans jouer un rôle, une personne sur scène, il s’adresse directement au public, en cherchant à créer un effet de spontanéité.

Il manipule le spectateur à sa guise. Il l’envoûte, le tétanise …

 C’est un conteur passionné dont la composante essentielle de l’art théâtral « la parole » possède multiples pouvoirs, qui apportent aux intrigues, l’intensité et l’émotion voulues.

 Les effets rhétoriques : la tonalité, l’enthousiasme, la colère, l’ironie, l’humour, la tristesse, la joie… les jeux sur le corps autant que sur les mots, suscitent l’étonnement.